Moi c'est AMY LANA BENFORD. J'ai VINGT ET UN ANS ans. Je suis née le DIX-HUIT FEVRIER MILLE NEUF CENT QUATRE-VINGT-DIX à MELBOURNE. Je suis SANS EMPLOI NI ETUDE. Je suis BISEXUELLE et je suis CELIBATAIRE. Je fais partie des TEEN'S. Et j'ai la même bouille que LINDSAY LOHAN.


«Bonjour mademoiselle Benford. Êtes-vous prêtes pour notre sixième séance ?
. Si j’viens encore c’est parce que mon oncle m’y oblige !
Je sais mademoiselle Benford, vous me le répétez à chaque séance… Bref, si vous voulez bien vous installer, nous allons commencer. Je suppose que vous ne voulez toujours pas me parler de votre passé ?
. J’sais pas… De toute façon j’ai rien à raconter de mon passé.
Je suis certain que si. Parlez moi de votre famille, vous me parlez sans cesse de votre oncle, mais et vos parents alors ?
. Ils m’ont abandonnés, alors je sais pas si on peut appeler ça des parents. Ma mère avait 21 ans quand elle m’a mise au monde, et mon père 27. J’avais un bon début de mon enfance, j’étais assez chouchoutée et beaucoup aimé par eux. Mais on était pauvres. Vous savez, docteur, on dit souvent que l’argent ne fait pas le bonheur. Moi j’crois que les gens qui disent ça n’ont jamais connu de problème d’argent. Sans ça, on vit pas, surtout dans notre monde pourri. Comment trouver le bonheur quand on vit dans un 9 m.² en pleine banlieue et qu’on trouve pas d’emploi ? Et surtout qu’on a un bébé en plus. Enfin bref, j’en ai marre de vous parler de mon enfance.
Non, vous étiez si bien partie. Je vous en prie, continuez donc.
. Bon, après tout j’suis là pour ça… Mon père en avait marre de voir ma mère et moi dans cette misère. Dans le fond, c’était un super papa en fait… Bref, il a voulu gagner de l’argent plus facilement. Il s’est alors lancé dans la vente de drogues. Au bout de quelques semaines, on arrivait enfin à payer nos factures sans rappels. Et enfin j’avais des jouets, comme toutes les gamines de mon âge. Je crois que tout ça n’a duré qu’une petite année.
Que s’est-il passé ?
. Un voisin de l’immeuble a dénoncé mon père. Ma mère lui avait pourtant souvent répété de ne pas faire ses deals près de l’immeuble, mais vous savez, il n’en faisait qu’à sa tête, comme tant d’hommes. Bref, les flics l’ont embarqués en pleine nuit. Et ce fut la prison pour mon papa. Je sais plus combien d’années, mais beaucoup. J’ai pu le voir une fois, durant une visite dans l’une de ces salles glauques avec des chaises et des tables, pendant dix minutes. J’avais quatre ans. Il me disait qu’il allait bientôt rentrer et me ramener la poupée dont je rêvais tant. Je ne l’ai jamais eu, et ce fut la dernière fois où je vu mon père. Quelques mois sont passés, pas tellement d’ailleurs, et ma mère ne put plus s’occuper de moi. Elle m’abandonna alors à mon oncle, le frère ainé de mon père.
Mais elle ne vous a pas abandonné, elle a juste souhaité une meilleure vie pour vous en vous donnant à quelqu’un de votre famille ayant plus d’argent, tout ça pour votre bonheur voyons.
. N’importe quoi ! Si vraiment elle avait souhaité mon bonheur, elle serait venu me rendre visite une fois par mois au moins ! Non au lieu de ça elle s’est trouvé un nouveau mari et a laissé mon père pourrir en prison !
Continuez…
. C’est une amie qui m’a raconté qu’elle avait un nouvel homme, peu après qu’elle m’ai abandonné d’ailleurs. Un riche, ce qui lui a permis de déménager loin d’ici, loin de moi, sa fille. Je n’ai plus de nouvelle d’elle depuis. Et j’ai pas envie de savoir ce qu’elle devient d’ailleurs.
Et votre père alors ?
. Mon oncle m’a interdit d’aller le voir en prison. Il a honte de lui et de ce qu’il a fait, beaucoup même. Il ne veut pas que je parle de lui à la maison, ni que je garde de photo de lui. Mais c’est mon père quand même, c’est pour ça que j’ai toujours une photo de lui et moi petite sur moi…
Vous croyez que votre addiction à la drogue vient du fait qu’il vous manque votre père ?
. Vous dites en gros que je comble l’absence de mon père par la drogue ? Ouais, peut être. Vous changez vite de sujet n’empêche, passer de mon enfance à mon problème avec la poudre blanche, wahou ! C’est vrai que je suis là pour régler ça, mais bon. Je vois pas pourquoi c’mauvais pour moi de me faire de temps en temps plaisir…
D’après votre oncle, c’est tout les jours.
. Et alors ? Ca va me faire quoi ? Me faire aller en prison ? Tant mieux je serais enfin avec mon père de toute façon ! J’ai plus rien à perdre vous savez docteur, j’peux pas descendre plus bas. La drogue a toujours fait mon bonheur, que ce soit avec sa vente ou au naturel. J’suis née avec ça, je mourrais avec. C’est pas vos séances à 100$ de l’heure qui vont me faire changer de point de vue.
Bon, changeons de sujet. Vous avez parlé d’une « amie » tout à l’heure. Dites m’en plus sur elle.
. Vous voulez que je vous dises quoi ? Elle s’appelait Ivannah, elle est arrivée en Australie à trois ans, c’est à l’école que je l’ai rencontré, et depuis on ne se lâchait plus. C’était ma seule véritable amie…
Pourquoi cette utilisation du passé ?
. Elle est partit. On s’est… disputée, gravement même, et elle est partit il y a un an.
Elle était plus qu’une amie n’est-ce pas ? Car il y a un an, vous avez commencé à consommer de la drogue, et à vous scarifier. Son départ en est la principale cause, ai-je tord ?
. … J’en sais trop rien. Oui, elle était bien plus qu’une simple amie. C’était ma petite -amie… On est sortit ensemble cinq ans. Ce n’était pas un simple amour, c’était bien plus que ça. C’est moi qui me suit avancée vers elle en lui avouant que je l’aimais. Elle était assez… choquée. Mais quelques semaines après ma déclaration, elle m’affirmait qu’elle aussi, m’aimait. Et depuis nous sommes sorties ensemble en cachette. Oui, on se cachait, on cachait notre amour au lycée, et devant nos familles, enfin moi devant mon oncle. Vous savez, docteur, nous vivons dans un moment intolérant. Les gens sont homophobes, sans le savoir. A leurs yeux, deux filles ne peuvent s’aimer, ils trouvent cela anormalement, et parfois même écoeurant. Pourtant on ne fait rien de mal, à personne. On ne fait que s’aimer. Enfin ne faisait. Elle aussi, m’a abandonné, en partant dans une université en Russie, son pays natal. Elle était tellement intelligente après tout. En fait, nous étions totalement différentes, et c’est ça qui faisait surement qu’on s’aimait tant. On était complémentaires. Certes, on se disputée assez souvent, que ce soit par crise de jalousie ou autre chose. Mais le jour où nous nous sommes le plus disputée fut quand elle m’annonça qu’elle était accepté dans on université de Russie. Je ne voulais pas qu’elle me laisse toute seule, et les relations à distances c’est impossible à mes yeux. Je lui ai alors dit que c’était moi ou ses études. Elle a hésité, docteur, beaucoup même. Mais elle est partit tout de même, me laissant seule.
Vous l’aimez encore.
. J’en sais rien…
Ce n’était pas une question, mademoiselle Benford. Si vous l’aviez oublié, vous ne vous vous serez pas scarifié un « i » à votre poignet droit.
. Ouais. Ouais, elle me manque. Trop même. Ca fait un an qu’elle est loin de moi. Vous savez, elle m’a envoyé quatre lettres depuis son départ, où elle demandait de mes nouvelles, si j’allais bien, ce que je devenais, si un jour je lui pardonnerais. Je n’y ai jamais répondu. Je n’ai pas le courage de lui parler de nouveau, je suis tellement rancunière. Mais je voudrais tant lui dire que je l’aime encore, autant qu’avant…
A part Ivannah donc, vous n’avez pas trop amis ?
. Non. J’avais des amis du lycée, mais à présent ils vivent leurs vies, et moi la mienne. Enfin je ne sais pas si on peut dire que je vis. Je passe mes journées à me faire des lignes, à préparer mes seringues, à me disputer avec mon oncle, à pleurer dans ma chambre, et à me faire du bien avec un morceau de miroir brisé. Je ne sors jamais, sauf pour aller faire les courses, chaque semaine. Je n’ai aucune vie sociale, docteur. Je ne parle à personne… Et mon oncle en a plus que marre de moi.
C’est pour cela qu’il a décidé de vous mettre dans un camp. Waka Waka, c’est ça ?
. Ouais. Il dit que c’est pour m’aider à m’en sortir, que je peux pas continuer à vivre ainsi alors que je viens d’avoir vingt et un ans… Je pars dans une semaine, donc docteur, c’est la dernière fois que l’on se voit.
Je le sais, mademoiselle Benford, c’est pour cela que j’ai récupéré l’adresse de votre camp. Nous continuerons à discuter de vos problèmes par lettre. Vous êtes sur la bonne route pour vous en sortir, ne baissez pas les bras maintenant Amy.»

Amy Lana Benford sortit alors du cabinet de son psy’. C’était la dernière fois qu’elle passait cette porte. Oui, à présent, elle devait se préparer pour l’Afrique. Elle ne voulait pas partir, ne voulait pas quitter le quartier où elle avait grandit. Même si celui-ci lui rappelait beaucoup de souvenirs pas totalement heureux. Son oncle était assez triste de la laisser partir, mais non seulement il ne supportait plus le comportement de la jeune femme, mais surtout, il en avait marre de voir sa nièce se détruire chaque jour sans qu’il ne puisse rien faire. Il l’adorait, sa Lana ( il préfère l’appeler par son deuxième prénom ), c’est pour cela qu’il a choisit un des meilleurs camps pour jeunes de son cas. Il l’avait pourtant bien élevé depuis ses quatre ans, enfin c’Est-ce qu’il croyait. Il n’était pas au courant pour l’histoire d’amour entre sa nièce et cette Ivannah, il ne comprenait donc pas totalement l’autodestruction d’Amy.
La jeune femme, en taxi, se dirigea alors vers la prison où se trouvait son père depuis toutes ses années. Oui, enfin, elle allait pouvoir le voir. Elle avait demandé à son oncle, en échange d’aller au camp, d’aller voir avant de partir son père. Elle regarda alors le paysage défiler devant ses yeux endormis, avant d’apercevoir au loin l’immense bâtiment. Il était pareil que dans ses souvenirs. Elle entra par une grille, surveillée par deux gardes qui regardèrent de haut en bas Amy. En effet la jeune australienne se faisait souvent remarquer par son physique, et notamment ses formes qu’elle mettait inconsciemment en valeur grâce à ses habits. De plus, Lana ne cachait pas ses scarifications nombreuses sur ses bras, elle n’en avait pas vraiment honte, et se fichait complètement de ce que pouvait penser les gens. Elle arriva alors enfin devant une grande salle, remplie de chaise et de table, où se trouvait déjà quelques détenus avec leurs visiteurs.
Un garde la fouilla alors, et l’a fit enfin rentrer. Elle s’installa à une table, assez éloignée des autres, et attendit son père, le regard rivé sur la porte des détenus. Enfin, elle le vit arriver, une marche lente, le regard vide, mal rasé, les cheveux en batailles. Il n’avait pas vraiment changé. Les mains menottées, un garde le dirigea vers Amy. Il resta alors face à elle, qui était assise, et son regard s’illumina soudainement. Doucement, il ouvrit la bouche, mais rien n’y sortit, et ses yeux commencèrent à s’humidifier. Amy, elle, se pinça les lèvres, se retenant de pleurer elle aussi. Elle ressemblait fort à son père, autant physiquement qu’au niveau du caractère. Tout deux paraissaient froids au premier abord, mais ils sont totalement naïfs, vulnérables et trop sensible. Il se laissa tomber sur sa chaise, face à sa fille, et lentement, il prit sa main menottée dans la sienne, la serrant aussi fort qu’il pouvait, comme pour s’assurer qu’elle était bel et bien devant lui.
« Enfin, enfin tu es là Mymy…
. Oui papa, je suis là. »
Ce fut les premières paroles qu’ils réussirent à s’échanger avant de doucement pleurer. Ils ne cessèrent de se regarder, Amy prenant attention à mémoriser chaque détail du visage de son cher père…

Aujourd’hui, pour Amy, c’est le grand jour, le jour de partir, d’abandonner l’Australie pour l’Afrique. Elle avait enfin revue son père, et avait dit au revoir à son oncle. A présent elle était dans l’avion, direction une nouvelle vie.